TAPISSERIE CONTEMPORAINE LURCAT
Jean Lurçat :
Peintre cartonnier (1892-1966)
Créateur infatigable, Lurçat est un artiste aux multiples facettes : peintre, poète, illustrateur, il se passionne pour les techniques de la céramique et de la tapisserie dont il est le plus illustre représentant du XXe siècle.
Engagé dans son époque, et passionnément curieux du monde, Jean Lurçat est né dans les Vosges à Bruyères, où Lucien, receveur des postes, et Charlotte engendrent une descendance de créateurs : Jean le peintre et André l’architecte.
Jean Lurçat se forme dans l’atelier de Victor Prouvé, chef de file de l’École de Nancy, puis vient s’immerger dans l’effervescence artistique et intellectuelle de Paris, il a alors vingt ans. Il complète sa formation en marge des circuits officiels, fonde avec des amis la revue Les feuilles de mai, et décide alors d’entamer une carrière de peintre fresquiste, mais le projet tourne court à cause de la guerre. Jean Lurçat, engagé volontaire, subit le sort terrible des fantassins ballottés dans la tourmente : cela le marquera à vie.
Un Lurçat, impatient et ne tenant pas en place, s’exprime durant la décennie des années vingt. Il se fait connaître par sa peinture, en France et aux Etats-Unis. Peintre de renommée internationale, il figura parmi les artistes les plus significatifs de son temps, tout en restant en marge des courants esthétiques contemporains. Il collabore avec Pierre Chareau, architecte-décorateur connu par l’intermédiaire de ses amis Jean et Annie Dalsace, les commanditaires de l’iconique maison de verre rue Saint-Guillaume. Il produit aussi de grands canevas brodés par son épouse et donne des projets de tapis.
La collectionneuse Marie Cuttoli fait tisser à Aubusson des tapisseries d’après des œuvres de Lurçat et des autres artistes de sa collection, et cette expérience ouvre la voie de la renaissance de la tapisserie par son ambition esthétique. Parallèlement, aux Manufactures nationales, un salon des Illusions d’Icare est tissé ; destiné à l’ambassade de France en URSS, il ne sera jamais mis en place à cause de la guerre.
Lurçat, à cette époque, abandonne la peinture de chevalet. L’étape décisive est franchie lorsqu’il s’approprie la technique de la tapisserie de lisse et s’implique dans la technique du langage de la laine. L’Apocalypse d’Angers qu’il découvre en 1938 confirme son intuition. Il perçoit le potentiel immense et l’originalité de cet art. Grosseur du point, gamme limitée et carton chiffré, il n’aura de cesse de prôner les avantages d’une méthode qui revient aux fondamentaux de la technique du Moyen âge, période qu’il estime celle des plus grands chefs d’œuvre de la tapisserie. Afin de soutenir les manufactures d’Aubusson, lourdement touchées par la grande crise et en panne de création, l’administrateur des Manufactures nationales, Guillaume Jeanneau, imagine de confier une grande commande à des artistes contemporains.